Rencontre avec les «Pères de la Nation» haïtienne

«Devant ces héros, il nous faut nous agenouiller.» Ainsi se termine le texte apposé au mur du Musée du Panthéon National résumant les combats des «Pères de la patrie». Entre les murs de ce mausolée circulaire, je fais la connaissance de Toussaint Louverture, Jean Jacques Dessalines, Henry Christophe et Alexandre Pétion. En réalité, le nom de ces héros qui luttèrent contre le système colonial et pour la création du premier Etat noir indépendant en 1804, m’est déjà familier. Leur patronyme a été repris pour nommer la plupart des lieux. Pétionville est the place to be de la capitale. La plupart des gens que je rencontre y vivent, l’ambassade suisse y siège, les restaurants et boutiques à la mode se sont aussi installés ici. Je loge dans le quartier d’à-côté, mais à l’impasse du Dr. Pétion quand même.

Toussaint Louverture

Sur le mur suivant, les portraits des quelques cinquante-six chefs d’Etat haïtiens (et autres gouvernements provisoires ou révolutionnaires) sont affichés côte à côte, sans autre hiérarchie que celle du temps. Une petite fiche donne pour chacun les informations de base : nom complet, année(s) et nombre de mois à la tête du pays, nom de l’épouse, nom(s) des enfants, réalisations importantes. Je m’amuse en découvrant que la femme de Jean-Jacques Dessalines, premier empereur d’Haïti répondait au doux nom de Marie-Claire Heureuse Félicité. Observe qu’une femme, Ertha Pascal-Trouillot a présidé – provisoirement – l’Île durant onze mois avant l’arrivée de Jean-Bertrand Aristide en 1991. Mais surtout qu’à partir de 1957, et la photo de François Duvalier, la catégorie «réalisations importantes» disparaît. A mes côtés, un couple d’Haïtiens – les seuls visiteurs croisés ce mardi matin – rient en commentant les informations données sur leurs dirigeants. Ils pointent du doigt l’âge de l’un, le nombre d’enfants de l’autre. Leur créole rapide ne me permet malheureusement pas d’en saisir davantage.

Esplanade du Mupanah
Dans une interview donnée par le directeur du musée au Nouvelliste en 2006, j’apprends que le Musée du Panthéon National, que tout le monde préfère appeler Mupanah, devait être un sépulcre pour recueillir le corps de François Duvalier (1957-1971). Une idée de son fils, Jean-Claude Duvalier – « Baby Doc » – qui lui succéda à la tête de l’Etat jusqu’en 1986. Le bâtiment est l’œuvre d’un architecte français, Alexandre Guichard, dont on ne retrouve aucune autre trace sur le Net. Le projet du fils Duvalier fit scandale. Dans un premier temps, le bâtiment garda tout de même son titre de «mausolée», mais il ne fut plus entièrement dédié la mémoire du père Duvallier, mais à tous les «Pères de la patrie». Le musée devient panthéon, par un décret émis en 1982. Dans l’interview, le journaliste et le directeur du musée évoquent les problèmes liés à ce décret pour le développement du lieu culturel, sans rentrer davantage dans les détails.

Après avoir terminé la visite par une exposition consacrée aux œuvres haïtiennes, où se mêlent artisanat et art contemporain, je déambule entre les bassins et les sculptures qui ornent l’esplanade du Musée. Au loin s’étend le Champ de Mars, le cœur historique de Port-au-Prince dévasté par le séisme de 2011. Tous les bâtiments officiels sont en reconstruction, entourés de larges balustrades rouges. Leurs châssis de béton s’élèvent vers le ciel. Au milieu, se dressent la statue d’un héro national que je ne parviens pas à identifier de même que la «Tour 1804», construite par Aristide à l’occasion du bicentenaire de l’Indépendance (mon chauffeur m’explique qu’il y prononçait/voulait y prononcer ses discours). Je ne retrouve aucune trace des campements d’habitations dont ont tant parlé les médias, mais une foule de passants qui vaquent à leurs occupations quotidiennes.

Vue sur le Champ de Mars

Cour de cassion en construction

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